Pourquoi le prix de l’électricité augmente-t-il ?

L’année 2022 a été marquée par deux évènements qui ont eu un impact sur le prix de l’électricité :

  • Le déclenchement de la guerre en Ukraine qui a eu pour effet d’augmenter de manière impactante le prix du gaz
  • La forte baisse de la production d’origine nucléaire liée au retard dans la maintenance des réacteurs du fait du Covid et aux réparations liées au problème de corrosion sous contrainte.

 

Si le gaz n’a été à l’origine en 2022 que 10% de la production d’électricité, l’augmentation de son prix a eu un impact fort sur le prix de l’électricité : pour illustrer ce propos, un doublement du prix du gaz se traduit par une augmentation de 10% du prix de l’électricité

 

Pour ce qui est du nucléaire, la production est passée de 361 TWh en 2021 à 279 TWh en 2022, soit une baisse de 23%. Or la part variable dans le prix de revient du nucléaire est négligeable : le cout du combustible nucléaire ne représente que quelques % du prix de revient final, tous les autres couts sont pratiquement fixes. En final, le cout de fonctionnement d’un réacteur nucléaire est pratiquement le même que le réacteur produise ou ne produise pas.

En conséquence, le cout de production de l’électricité d’origine nucléaire a augmenté de 23% en 2022. L’électricité nucléaire représentant de l’ordre de 70% du total de l’électricité produite, cela signifie que, rapporté à la production totale d’électricité, l’impact est une hausse de 70% x 23 % = 16%.

 

Pour réduire l’impact de ces hausses, dans le cadre de la mise en place du bouclier tarifaire, l’accise sur l’électricité a été réduite au minimum entre le 1er février 2022 et le 31 janvier 2024, à savoir 1 €/MWH pour les particuliers et 0,5 €/MWh pour les professionnels. Son prix aurait dû être de 32 €/MWh en 2023 pour les particuliers.

 

En 2020, cette taxe, l’accise sur l’électricité a rapporté 7,4 milliards d’euros. Et son montant ne va pas se réduire au cours des prochaines années. Bien au contraire.

 

Mais au fait, c’est quoi cette accise sur l’électricité ?

Anciennement dénommée CSPE (Contribution au Service Public de l’Électricité), elle contribue principalement au financement des énergies renouvelables. Concrètement, lorsqu’un parc solaire ou éolien est mis en service, le prix d’achat du MWh produit est garanti par l’État. EDF le rachète au producteur à ce prix garanti et l’État, via le biais de la CSPE lui compense l’écart entre son prix d’achat et son prix de vente réel. C’est donc en final le consommateur qui finance le cout plus élevé du MWh d’origine renouvelable. Il y a une vingtaine d’année, les premiers parcs solaires avaient un prix garanti de 600 €/MWh, ce prix est maintenant plutôt de l’ordre de 130 à 140 €/MWh. Pour l’éolien, les parcs qui vont être mis en service au cours des prochains mois et qui faisaient partir de l’appel d’offre de 2018 sont de l’ordre de 150 €/MWh (parc de la baie de Saint Brieux : 155 €/MWh). Le consommateur paiera la différence pendant les 20 prochaines années.

 

A titre comparatif, le prix auquel EDF vend depuis 2010 son électricité d’origine nucléaire à ses concurrents est de 42 €/MWh (ARENH)

 

Que s’est-il passé en 2023 ?

  • La production d’électricité d’origine nucléaire a augmenté pour atteindre 320 TWh. Moins qu’en 2021, mais plus qu’en 2022. Son cout de production s’est amélioré, mais reste inférieur à celui de 2021
  • Le prix du gaz est progressivement revenu à un niveau proche de celui de 2021, surtout en fin d’année. Il y a eu un impact résiduel sur le prix de l’électricité.

Les hausses de prix de vente ont permis de rattraper les écarts de 2022

 

Que peut-on attendre pour 2024 ?

  • Une production nucléaire encore en amélioration
  • Un prix du gaz stabilisé à un niveau proche de celui de 2021
  • Un accroissement significatif de la part de l’électricité d’origine renouvelable

Avec quelles conséquences sur le prix de production de l’électricité ?

  • Pour le nucléaire, il est clair que le prix de l’ARENH, soit 42 €/MWh est beaucoup trop faible et fait perdre de l’argent à EDF. Avoir forcé EDF à vendre à ce prix-là, c’est à dire à perte, alors que sa production baissait et que son cout de production unitaire augmentait s’est soldé par une perte énorme : 18 milliards d’Euros de perte d’EDF en 2022. Le prix de revient d’EDF est très supérieur au 42 € de l’ARENH. La preuve l’accord d’un prix de référence de 70 €/MWH à partir de 2026. Le prix de l’électricité nucléaire ne baissera donc pas
  • Pour l’électricité d’origine renouvelable, l’augmentation des quantités produites se traduira au cours du proche avenir par une augmentation du montant total à payer aux producteurs du fait du prix garanti. L’accise sur l’électricité n’est pas près d’être réduite. Bien au contraire.

 

Finalement, l’équation de 2024 se résume à une question : l’augmentation de la quantité d’électricité d’origine nucléaire produite permettrait-elle une réduction du prix de vente du MWh égal à l’augmentation de l’accise sur l’électricité, prévue pour 10%. Si la réponse était oui, l’augmentation faciale du 1er février 2024 pourrait être évitée, avec une mise en place de l’accise sur l’électricité et simultanément une baisse du prix hors taxe de l’électricité.

Pour cela, il faudrait en 2024 une augmentation de production d’électricité d’origine nucléaire de l’ordre de 15%, atteignant donc 368 MWh, soit un peu plus que la production de 2021. Pas sûr que la disponibilité encore limitée des réacteurs nucléaires le permette.

 

En conclusion, le prix de l’électricité na va pas se réduire au cours des prochaines années.

Cela étant, une gestion planifiée des réacteurs nucléaires, avec la possibilité d’en prolonger la durée de fonctionnement dans des conditions appropriées de sécurité (le grand carénage) permettra de disposer d’une base d’électricité à un cout finalement assez faible, et de permettre de poursuivre une transition énergétique dans des conditions économiques lissées.

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