Emprise au sol : toutes les énergies ne se valent pas

Selon le critère de l’emprise au sol, toutes les sources énergies se valent-elles pour produire de l’électricité ?

Une des composantes de la préservation de l’environnement est la limitation de l’emprise au sol des différentes activités développées par l’homme.

L’extension des villes, en particulier via la bétonisation des périphéries urbaines, au détriment des terres cultivables, prairies et forets, a fait prendre conscience que l’artificialisation des sols était un vrai problème et que l’emprise au sol est un critère important à prendre en compte dans tout projet.

 

Lorsque l’on parle d’énergie, et en particulier de la production d’électricité, de nombreux paramètres sont généralement mentionnés : rendement, émission de CO2, effluents divers, dont les particules fines ou déchets radioactifs. Il est rarement fait état de l’emprise au sol, alors que c’est une vraie question : selon le critère de l’emprise au sol, toutes les sources énergies se valent-elles pour produire de l’électricité ?

 

En France, en 2019, la production d’électricité s’est élevée à 538 TWH (538 milliards de KWH) avec une origine :

  • nucléaire pour 70,6%
  • hydraulique pour 11,2 %
  • gaz pour 7,2%
  • éolienne pour 6,3%
  • solaire pour 2,2%
  • bioénergies (biogaz, biomasse, déchets ménagers) pour 1,8%
  • fioul pour 0,4%
  • charbon pour 0,3%

(Source RTE : bilan électrique 2019)

 

Quelle est la production moyenne annuelle d’énergie d’une centrale nucléaire en France ?

Pour le nucléaire, les sites de production d’électricité regroupent généralement plusieurs réacteurs : 2 à Fessenheim et à Chooz, 4 à Bugey, Chinon, Paluel et Catenon, avec des puissances par réacteur de 900 MW, 1,3 GW et 1,45 GW :

 

Production d’énergie pour les principaux sites nucléaire en France
Nom du site Surface Puissance installée Production Moyenne Annuelle
(hectares) ( GW) (milliards de KWH)
=========== ====== ====== ===========
Fessenheim 100 1,8 10
Bugey 100 3,6 25
Chinon 155 3,6 25
Paluel 160 5,2 32
Chooz 200 2,9 18
Catenon 415 5,2 35

 

Cet échantillon de 6 sites et 20 réacteurs, sur les 19 sites et 58 réacteurs que compte la France, indique que les centrales nucléaires présentent une puissance installée d’environ 2KW/m2, et produisent 12800 KWH/m2

 

Quelle est la production moyenne annuelle d’énergie d’un site hydraulique en France ?

Pour l’hydraulique, l’échelle est assez large, car il y a des barrages de toutes tailles et de différents type : de retenue (comme Roselend) et au fil de l’eau (comme Génissiat et Chastang).

Les caractéristiques de ces barrages sont les suivantes :

 

Production d’énergie pour les principaux sites hydraulique en France
Nom du site Surface Puissance installée Production Moyenne Annuelle
(hectares) ( GW) (milliards de KWH)
=========== ====== ====== ===========
Roselend 320 0,55 1
Genissiat 500(estimé) 0,42 1,7
Chastang 700 0,3 0,59

 

Soit une fourchette indicative de puissance installée de 0,1 KW/m2 et une production de 240 KWH/m2

 

Les STEP (Station de Transfert d’Energie par Pompage – qui fonctionnent par pompage et turbinage) comme les barrages de Grand Maison et Vernet, sont d’abord des systèmes de stockage d’énergie et non des barrages hydroélectriques au sens pur du terme. Ils ne sont donc pas pris en compte dans cette approche de production par m2

 

Quelle est la production moyenne annuelle d’énergie d’une centrale à gaz en France ?

Pour les centrales à gaz, il y a peu de données disponibles.

Production d’énergie pour les centrales à gaz en France
Nom du site Surface Puissance installée Production Moyenne Annuelle
(hectares) ( GW) (milliards de KWH)
=========== ====== ====== ===========
Martigues 42 0,93 4
Bouchain 130 0,6 3

 

L’échantillon est réduit, et la superficie des sites est indicative, car correspondant généralement à des sites existants antérieurement, sur lesquels ces centrales à gaz ont été installées. Les surfaces dédiées à l’activité centrale à gaz peuvent très certainement être divisées par 3 ou 4. En divisant par 3,5, cela donnerait une puissance de 3 KW/m2 et une production de 14 000KWH/m2/an

 

Quelle est la production moyenne annuelle d’énergie d’une éolienne en France ?

Pour l’éolien, il y a deux emprises au sol : la première, l’emprise physique de la base de l’éolienne, est en moyenne de l’ordre de 2000m2 pour une éolienne moyenne actuellement installée (2 MW de puissance). La seconde, celle liée au volume nécessaire au fonctionnement de l’éolienne (qui pivote sur elle-même en fonction de la direction du vent) est beaucoup plus importante (environ 10 fois plus que l’emprise physique de la base de l’éolienne, soit dans notre approche 20.000M2)

Une éolienne de 2MW produit environ 5 GWH par an.

Sur cette base,

  • 1 m2 d’emprise au sol physique représente une puissance de 1 KW/m2 et une production de 2500 KWH/m2/an
  • 1m2 d’emprise au sol volumique représente une puissance de 0,1 KW/m2 et de 250 KWH/m2/an

 

Pour le solaire au sol, sur la base d’un rayonnement solaire moyen de 1KW par M2, un rendement de 18%, un taux d’occupation au sol de 70% et un fonctionnement de l’ordre de 1200 Heures par an en puissance crête, la puissance moyenne effective s’élève à 0,13KW par M2, et la production moyenne de 150 KWH/m2/an

 

Tableau comparatif de la production annuelle par m2 d’éléctricité en fonction du type d’énergie

Il ne reste en France que peu de centrales thermiques fonctionnant au fioul et au charbon : en effet, la dernière centrale à fioul en France métropolitaine a été fermée en 2018, et Cordemais, qui sera la dernière centrale à charbon à être fermée dans les prochaines années, voit, comme les autres centrales à charbon, sa production limitée au périodes de pointe. Elles ne s’inscrivent donc pas dans un échantillon comparable aux autres modes de production d’électricité.

Ces résultats sont synthétisés dans le tableau ci dessous

 

Classement des types énergie en fonction de leur production annuelle par m2
Type d’energie Puissance par m2 Production annuelle par m2
(KW/m2) (KWH/m2/an)
=========== ====== ======
Nucleaire 2 12 800
Hydraulique 0,1 240
Gaz 3 14 000
Eolien 0,1 250
Solaire 0,13 150

 

Un classement des énergies par emprise au sol montre que le nucléaire et les centrales à gaz sont de loin aujourd’hui les sources d’énergie les moins consommatrice d’espace. Il faut environ 50 fois moins d’espace par rapport à l’éolien et presque 100 fois moins d’espace par rapport au solaire pour produire un KWH avec du nucléaire ou du gaz. Et ce sans qu’il soit nécessaire de prévoir en plus un système de stockage, qui nécessiterait de l’espace additionnel, en raison de l’intermittence des énergies renouvelables en terme de production. Les ratios sont du même ordre de grandeur pour l’hydraulique, avec l’avantage de ne pas avoir à rajouter des surfaces pour le stockage aux surfaces déjà prises en compte, la production d’hydroélectricité étant prévisible et contrôlable.

 

Toutes les énergies ne se valent donc pas en terme d’emprise au sol.

Toutes les énergies ne se valent donc pas en terme d’emprise au sol. Sous quelque forme que ce soit, la production d’électricité par des énergies renouvelable nécessitera beaucoup d’espace. Il convient donc d’en optimiser l’installation.

 

Remplacer des centrales nucléaires par des énergies renouvelables se solde par une augmentation d’emprise au sol d’un facteur 100. Le développement des énergies renouvelables doit donc d’abord avoir pour objectif de se substituer aux énergies fossiles, et non au nucléaire.

Pour le solaire, sachant que la construction de centrales au sol demande énormément de surface, la bonne stratégie est l’installation de panneaux sur des surfaces existantes, principalement les toits des bâtiments. A l’heure où se développe une conscientisation contre la bétonisation des espaces urbains, il serait dommage que les espaces ainsi préservés grâce à des mesures de conservation soit finalement recouverts de panneaux solaires alors que leur installation sur des toits devrait être une priorité.

Pour l’éolien, l’éolien maritime est certainement une option à privilégier, puisque dans ce cas, seule l’emprise physique, qui est la plus réduite, impacte réellement la surface maritime et celle du sol sous marin.

Pour l’hydroélectricité, le développement des barrages peut être poursuivi de manière ad hoc sur les projets les moins invasifs en terme d’emprise au sol.

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Cet article a 5 commentaires

  1. Pourquoi ne compte pas les surfaces d’exclusion nucléaire ? Au bout d’une cinquantaine d’années d’exploitation ont été rayés de la carte environ 5 000 km2 à Tchernobyl, Fukushima et Kychtym (source Wikipedia). Et ce pour des durées très importantes (48 000 ans à Tchernobyl – source Wikipedia). Si l’exploitation nucléaire continue et s’intensifie avec les technologies utilisées aujourd’hui, on aura quoi au bout de 50 000 ans ? 5 millions de km2 rayés de la carte ?

    1. Parce qu’en général les centrales nucléaires ne sont pas censées exploser. Si vous voulez faire ce calcul ridicule, il vous faudra diviser les 2500 km² (et non pas 5000) de Tchernobyl par toutes les centrales existantes. A Fukushima, les gens sont déjà revenus sur la quasi totalité de la zone.

  2. Si je vous suis bien vous partez du principe qu’on fait péter nos centrales tous les 50 ans. Ce n’est plus du pescimisme à ce niveau. Si vous vous instruisez sur ce qu’est une centrale et ce qui les différencies les unes des autres vous comprendrez rapidement. Ce qui est arrivé à Tchernobyl est inconcevable en France pour la simple et bonne raison qu’une REP ou une EPR ne peuvent tout simplement pas exploser comme un RBMK de par leur conception.

    Donc même en imaginant le pire, le site de contamination ne se limiterait qu’à la centrale en elle même post démentellement, sous réserve des stratégies de décontamination qui seront mise en place.

    Vous comprenez maintenant pourquoi cette info est complètement inutile dans ces tableaux ? Et Wikipedia a ses limites, variez vos sources svp, celle-ci est un bon début : https://www.irsn.fr/FR/Pages/Home.aspx

    1. En France on ne fait pas péter les centrales.

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